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Les portraits d’ODIL : Ange Kasongo

La journaliste Ange Kasongo est la créatrice du site de vérification de faits Balobaki Check. Ancrée à Kinshasa, une ville dont elle parle avec passion et précision, elle a remporté début octobre, avec son équipe, le Prix de l’innovation dans les médias décerné par l’Organisation internationale de la Francophonie, France Médias Monde et Reporters sans frontières. Portrait.

Écouter Ange Kasongo parler de Kinshasa, c’est y être un peu. « J’adore Kinshasa la nuit. J’aime le fait qu’ici, la dureté de la vie n’impacte pas l’humeur des habitants, j’aime leur débrouillardise ». À cette description vibrante, elle ajoute celle de l’odeur du poulet mayo et du son de la rumba. Kinshasa est la ville qui l’a vue naître. C’est dans la plus grande agglomération francophone au monde qu’elle vit et travaille, notamment comme correspondante pour l’agence Reuters. Ce poste lui donne accès à des sources d’information officielles, un atout crucial pour son activité de fact-checking au sein de Balobaki Check, le média communautaire en ligne qu’elle a lancé en 2022, en vue des élections.

Cette période était charnière en République démocratique du Congo, avec des élections locales : « on a pu voir la propagation des discours politiques de plus en plus orientés, et de plus en plus de fake news ». À cela s’ajoutait la montée en puissance des influenceurs sur les réseaux sociaux, parfois porteurs de fausses informations : « Je me suis rendue compte qu’ils étaient de nouveaux acteurs médiatiques et qu’ils pouvaient créer un désordre de l’information en période électorale. ».

Liberté et rigueur

Aujourd’hui, Balobaki Check compte une équipe de 10 journalistes, dont cinq permanents. En octobre dernier, le site a accueilli 7 000 visiteurs. Pour cette diplômée de l’ESJ Lille, Balobaki incarne « la liberté, bien sûr, mais surtout la rigueur ». La rigueur des mots et des faits, des qualités qui ont mené la journaliste au fact-checking. Après des études de master en France, à la suite de son diplôme de journalisme à Kinshasa, elle rejoint en 2019 le bureau de l’AFP dans la capitale congolaise, où elle avait déjà effectué un stage. Pendant 13 mois, elle y travaille comme vérificatrice de faits.

Parallèlement à ses activités à l’AFP, elle devient formatrice, notamment pour l’UNICEF. Ce rôle l’amène à parcourir la RDC, ce pays immense où cohabitent quatre langues officielles et de nombreuses langues locales. Cette immersion sur le terrain l’inspirera plus tard à intégrer, dans Balobaki Check, des contenus en langues nationales, notamment des podcasts.

Écrire un roman pour sortir des faits

Créer son propre média était l’aboutissement naturel d’un parcours marqué par une spécialisation dans le développement numérique des médias. Elle avait déjà effectué six mois en stage à RFI, à Paris, où elle travaillait à l’optimisation des contenus radio pour le web.

Passionnée par l’écriture et la lecture, Ange Kasongo voit dans la littérature « un moyen de s’évader, de sortir des faits », explique celle qui a publié un premier roman en 2019, Les Femmes de Pakadjuma. « La littérature me permet d’aborder autrement mon environnement, de dire davantage qu’en agence ou sur Balobaki.» Jamais très loin des faits et de la rigueur journalistique, elle confie aimer des auteurs journalistes, comme Florence Aubenas.

Parmi ses projets, elle rêve de voir son média grandir, tant sur le plan éditorial que sur celui de la reconnaissance. Elle aspire également à poursuivre ses activités de formation : « Pourquoi ne pas voir plusieurs générations de fact-checkers émerger en République Démocratique du Congo ?». Belle perspective.

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