Entretien

Sammy Mupfuni, de CongoCheck

Un entretien enregistré le 08 octobre 2021, publié le mercredi 3 novembre 2021

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Lauréat 2020 du prix francophone de l’innovation dans les médias, CongoCheck est à la fois initiative de vérification des faits, centre de formation pour les fact-checkers et programme d’éducation aux médias et à l’information. Son directeur général, Sammy Mupfuni, vient raconter la création et l’ascension de ce projet.

Au son des bars, des concerts et des églises de Kinshasa, Sammy Mupfuni ne cache pas sa fierté lorsqu’il parle de son projet CongoCheck. Et pour cause : l’initiative gagnante du prix décerné par RSF, l’OIF et RFI a fait du chemin depuis sa création. À l’origine, celui qui se trouve au micro d’ODIL, le podcast avait monté ce projet avec deux confrères, Fiston Mahamba et Rodriguez Kastuva, sur leurs fonds propre. Dans un contexte électoral, si propice à la prolifération de fausses nouvelles politiques, aucun média ne semblait pourtant se spécifier dans la vérification des déclarations de politiques. Grâce à leurs contacts et leurs expériences chez Africa Check ou Les Observateurs de France 24, les trois co-fondateurs ont rapidement pu mettre sur pied une initiative de vérification des faits en République Démocratique du Congo : CongoCheck.

Une professionnalisation rapide et reconnue

CongoCheck compte aujourd’hui plusieurs cordes à son arc, et plusieurs distinctions à son palmarès. En à peine plus de trois ans (l’initiative s’est créée en 2018), CongoCheck a réussi à recruter plus d’une trentaine de journalistes actifs en République Démocratique du Congo, au Congo Brazzaville et en République Centrafricaine, à devenir signataire de la charte de l’IFCN (International Fact Checking Network) et à obtenir un partenariat avec Facebook. Afin d’assurer la qualité de la formation de leurs journalistes, Congo Check a également mis en place, en partenariat avec la Deutsche Welle, Congo Check Academy, un centre de formation à destination des journalistes et qui mène des actions d’Education aux Médias et à l’Information auprès de la population.

L’expérience au service de l’information

Si CongoCheck s’est imposée en tant que référence dans le paysage médiatique actuel de la RDC, c’est aussi par la qualité de sa réaction face à la pandémie de Covid-19. Sammy Mupfuni explique que la couverture de l’actualité liée à l’épidémie d’Ebola a pu armer l’équipe face au déferlement de fausses nouvelles associées à la Covid-19, ce qui a directement permis une réaction rapide et efficace. Si aujourd’hui la santé et la politique restent les thématiques majeures auxquelles ont affaire


Entretien

Nelly : Bienvenue dans Odil le podcast. Nous avons le plaisir de recevoir aujourd’hui Sammy Mupfuni, directeur général de Congocheck, une rédaction de vérification des faits en République Démocratique du Congo 

Sammy : Bonjour 

Guillaume : Bonjour ! Et vous allez entendre des bruits de Kinshasa dans ce podcast puisque au moment où on a enregistré, j’ai l’impression que le concert se prépare autour de Sammy. Mais on va faire avec !

Sammy : On est à Kinshasa, c’est ça la réalité ! Les églises, les bars, les cafés tout ça !

Nelly : Sammy, Congocheck est vainqueur de l’édition 2020 du prix francophone de l’innovation dans les médias organisé par l’Organisation Internationale de la Francophonie, Reporters sans Frontières et Radio France Internationale … Déjà félicitations pour cette belle réussite ! Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment vous avez commencé à Congo check et comment vous en êtes arrivés jusqu’ici ?

Sammy : Merci beaucoup Nelly, merci à Guillaume aussi, bonjour tout le monde !

On a eu le prix de l’innovation dans les médias de l’OIF et RSF, et nous en sommes très fiers. CongoCheck a commencé début 2018 dans un contexte électoral. On venait de suivre quelques formations avec la Deutsche Welle Akademie, on s’est inspiré également d’Africa Check parce qu’on était en contact avec eux et on collaborait avec les Observateurs de France 24. Quand ils avaient quelques sujets à traiter dans la région, ils nous contactaient, on était déjà comme leurs collaborateurs dans la région. Lors des élections, on a senti ces besoins là, il y avait beaucoup de médias déjà en RDC qui traitaient de l’actualité mais aucun média ne se spécialisait dans la vérification des faits alors qu’il y avait ce besoin là. Il y avait beaucoup de fausses nouvelles. Pendant les élections, pendant la période électorale et on a décidé d’adapter ce que faisaient Africa Check et les Observateurs de France 24 dans notre pays et dans le contexte électoral qui était à cette époque là.

Nelly : Oui, parmi les invités de Odil le podcast, on a eu effectivement différentes initiatives qui se sont montées dans des contextes électoraux qui sont des contextes assez propices à la propagation de fausses informations. Vous dites que vous êtes inspirés d’Africa Check, c’est-à-dire que vous aviez déjà des journalistes qui travaillaient là-bas qui se sont détachés, qui sont venus vous aider ? Vous avez suivi des formations avec eux ? Quels ont été vos liens ?

Sammy : On était en contact avec eux, on suivait ce qu’il faisait mais c’était pas un contact direct. On était en contact avec les Observateurs de France 24 quand ils voulaient vérifier des images. On suivait de loin ce que faisait Africa Check. Quand il a eu ce contexte là (électoral, NDLR) on était journalistes depuis longtemps, on traitait de l’actualité dans des médias locaux et des agences de presse internationales. On s’est dit qu’il fallait adapter ce qu’on voyait faire Africa Check et les Observateurs. C’est comme ça qu’on a décidé de mettre en place une plateforme avec Congocheck, spécialisée dans la vérification des faits.

Capture d'écran de la page d'accueil du site de CongoCheck - 19 octobre 2021
Capture d’écran de la page d’accueil du site de CongoCheck – 19 octobre 2021

Guillaume : Aujourd’hui, comment est-ce que vous touchez le public ? Où est-ce qu’on peut vous lire ou vous voir ?

Sammy : On a un site Internet : congocheck.net, des réseaux sociaux. On ne se limite pas en ligne seulement parce qu’une fois de plus, le contexte local n’est pas comme celui dans lequel travaillent les Observateurs, même si on s’est inspiré de leur travail. Ici beaucoup de gens ne sont pas connectés même si la source de beaucoup d’infox c’est internet. On fait également des descentes sur le terrain, des sensibilisations, on ne se limite pas à publier des articles en ligne. On est en ligne, sur Internet, on est sur le site Internet, on a aussi beaucoup de réseaux sociaux qu’on utilise pour nos partager nos articles de vérification.

Guillaume : Ce que je retiens, qui est très intéressant dans ce que vous venez de dire, c’est que, certes il y a les réseaux sociaux qui sont des vecteurs de propagation de la désinformation mais vous devez faire du bouche-à-oreille parce que tout le monde n’est pas connecté. Pourtant la désinformation elle se propage aussi sans téléphone, juste de bouche-à-oreille c’est comme ça?

Sammy :

Presque 90% des Congolais ne sont pas connectés, pourtant ils sont aussi victimes de fausses nouvelles. Quand ça les atteint, ça vient d’Internet, des gens qui sont connectés et ça les atteint ils sont aussi victimes. C’est pourquoi nous aussi on utilise tous les canaux, que ce soit internet, les réseaux sociaux, et également les techniques offline.

Sammy Mupfuni, CongoCheck

Nelly : Dans le contexte dans lequel vous vous êtes créés, c’est-à-dire un contexte d’élections présidentielles, quel contenu vous avez eu à vérifier ? Est-ce que c’était des déclarations de personnages politiques ou des rumeurs qui circulaient parmi les citoyens ou même sur les réseaux sociaux ?

Sammy : Ici on a deux regroupements politiques qui utilisent la propagande et les fausses nouvelles qui vont avec. Il y en a eu de tous les côtés et c’est pourquoi on a décidé de mettre un site de d’information en place qui s’est chargé de vérifier.

Guillaume : Depuis 2018 que vous existez, ça veut donc dire que vous avez survécu, vous avez trouvé un moyen de subsister. Comment est-ce que vous financez à Congocheck ?

Sammy : Dès le lancement, et comme on s’était inspiré d’Africa Check au début, on est entré en contact avec Africa Check et ils nous ont mis en contact avec la Shuttleworth Foundation. C’était notre première aide pour mettre en place l’équipe et s’approvisionner en matériel, ordinateur, connexion Internet tout ça. Donc on a eu un prix, c’était le premier prix de CongoCheck pour nous aider à mettre en place l’équipe et se lancer dans la vérification. On n’avait pas beaucoup de moyens pour se lancer donc on a eu le premier prix de Shuttleworth foundation qu’on a eu grâce à Africa Check

CongoCheck explique son financement sur son site internet.
Source : congocheck.net, consulté le 19 octobre 2021

Ensuite on est entré en contact avec des organisations internationales comme InterNews qui supportait les médias locaux, qui se charge du développement des médias en Afrique, dans beaucoup de pays africains. Ils nous ont accompagné sur certains projets, certains programmes spéciaux comme FactCheck Ebola qu’on avait lancé durant l’épidémie d’Ebola en RDC. Ils nous ont accompagnés et ça nous a beaucoup aidé à survivre, à financer nos activités. Ils nous ont beaucoup soutenu, c’est des partenaires presque permanents. Ils nous soutiennent sur plusieurs projets. Et après on est entré en contact avec Facebook, dans son programme de vérification des faits et voilà c’est comme ça quand on se finance.

Nelly: C’est très intéressant et ça m’évoque plein de questions qui me viennent à l’esprit mais j’y reviendrai après. Notamment sur le fait que vous avez vécu en fait une épidémie d’Ebola avant l’épidémie de COVID-19 et que j’imagine que c’est une expérience qui a du vous être très utile pour couvrir la pandémie, l’infodémie qui circulent à cette période de COVID-19 ?

Sammy : Exactement. On avait lancé le programme Factcheck Ebola suite aux discussions qu’on avait eues avec l’équipe de communication du ministère de la santé en RDC. Après on s’est décidé à lancer le programme mais on a beaucoup gagné en expérience … À tel point que

quand il y a eu les premiers cas signalés de la COVID-19 en RDC, on s’est dit qu’il y aurait forcément des fausses nouvelles qui seront liées à ce sujet. On n’a pas attendu, on a directement lancé le programme FactCheck Covid19. Ça nous a beaucoup aidé en expérience, on a gagné beaucoup d’expérience dans la couverture d’une telle crise sanitaire.

Sammy Mupfuni, CongoCheck

Guillaume : Alors vous avez parlé de l’équipe … Quel est le profil type d’un collaborateur de CongoCheck ? On peut peut-être déjà commencer par donner une idée de la taille de l’équipe, combien êtes-vous ? Et puis quel est le passé, la compétence des membres de votre équipe?

Sammy : On a une trentaine journalistes qui travaille. C’est un peu atypique mais ça se comprend parce ce qu’on a trois pays donc la RDC, la RCA (République Centrafricaine, NDLR) et le Congo-Brazza(ville, NDLR). Comme c’était un nouveau domaine dans la région, on n’était pas très exigeant à choisir nos collaborateurs. On a un programme de formation, Congo Check Academy, donc tout ce qui nous intéresse, ou en tout cas au début, c’est l’intérêt pour le fact-checking et pour l’initiative. Après on se lance dans la formation, on partage des connaissances, des techniques de vérification tout ça. On a une trentaine de journaliste qui ont de l’expérience en journalisme mais qui sont novices dans le fact-checking. Même si la vérification fait partie du travail de journaliste, c’est un peu nouveau les techniques de fact-checking. Comme on a un programme de formation, on le soumet à tous nos collaborateurs ce programme et voilà.

Nelly : Comme un bon club de foot, vous avez un centre de formation pour des jeunes recrues que vous arrivez à repérer parmi des pépites qui sortent de l’université … Vous avez des bureaux qui sont uniquement situés à Kinshasa en République Démocratique du Congo ou vous avez également des bureaux au Congo Brazzaville et en RCA ?

Sammy : On n’a pas de bureau dans ces deux autres pays-là, on est seulement en RDC et c’est pas à Kinshasa c’est à Goma, dans l’est du pays parce que c’est là vraiment la base. La RDC c’est très grand, on a la ville de Kinshasa, de Lumbashi dans la région de Kasaï, on a aussi des collaborateurs dans plusieurs villes : à Kisangani, à Béni, à Bounia, dans plusieurs villes.

On a un groupe WhatsApp qui joue le rôle de salle de rédaction virtuelle, dès qu’il y a une fausse nouvelle qu’on doit vérifier, on la met dans le dans le groupe WhatsApp et on identifie le domaine dans lequel la nouvelle est située, et après on choisit qui va se s’en charger.

Guillaume : Vous avez votre réseau journalistes et votre réseau de veille pour vous coordonner au niveau national, bien étalé géographiquement. Vous avez ce réseau de veille qui est constitué de votre équipe puis vous décidez ensuite comment vous allez à traiter les informations … 

Sammy : exactement

Guillaume : si on parle des outils que vous utilisez, quelles sont les les les outils de vérification et les techniques de vérification ? Il y a des choses spécifiques à votre région, par exemple, auxquelles il faut être attentif quand on fait du fact-checking ?

Sammy : Comme toutes les autres initiatives de fact-checking, on utilise les mêmes outils et peut-être moins que les autres. On mise beaucoup plus sur la descente sur le terrain parce qu’il y a des images qui circulent parfois et quand on utilise les outils disponibles pour vérifier les images, c’est un peu compliqué, c’est pas très évident. Parfois il faut descendre sur le terrain, vérifier par nous-mêmes ce qu’il y a eu, où ces images ont été prises … Mais ça c’est trop coûteux et donc on utilise les techniques de vérification de base : appeler les sources primaires, quand c’est cité dans une publication. On utilise aussi les outils de vérification d’image parce que très souvent des fausses nouvelles qui circulent avec des images d’illustration. On utilise des outils disponibles de vérification d’images même si c’est parfois limité on est obligé de parfois descendre sur le terrain pour combler ce vide-là

Nelly : Est-ce qu’il y a un type de désinformation auquel vous faites particulièrement face ou est-ce que c’est des fausses nouvelles qui évoquent des milieux qui sont très différents ?

Sammy : Ouais on a on a des thématique récurrentes, surtout cette époque de crises sanitaires comme le Covid-19. En tout cas beaucoup de fausses nouvelles qui circulent, au sujet de cette crise sanitaire de la Covid 19 mais en première position, c’est des fausses nouvelles liées à la politique, liées à la situation politique. C’est vraiment ce qui occupe la première position, on a la politique, on a la santé … Ce sont les deux thématiques qui occupent la première position et qui reviennent très souvent. 

Guillaume : lorsque vous êtes lancés, vous veniez combler un vide finalement. Il n’y avait pas d’initiative de fact-check en tant que tel, défini comme tel dans le pays … Comment est-ce que vous avez été reçu par le public est-ce que vous avez été bien accueilli ? Est-ce que c’est difficile de faire son trou au départ ?

Sammy : Oui, ça a été un peu difficile au début parce que les gens ne comprenaient pas comment on remettait en question leurs déclarations. Ils nous en voulaient beaucoup. Surtout quand on est entré en contact avec Facebook on a commencé à travailler avec eux, parce que quand on vérifie une fausse nouvelle sur Facebook, on la soumet à la vérification. S’il s’avère que la vérification montre que c’est une fausse nouvelle, la visibilité de la publication est réduite et il y a même une étiquette placée sur la publication. Du coup les gens ici ne comprenaient pas et se sentaient attaqués. Parfois ils revenaient vers nous avec des attaques tout ça et voilà c’était pas très facile 

Guillaume : Est-ce que est-ce que là vous parlez de gens qui relayaient des fausses informations, qu’ils les créaient pas forcément mais qui les partageaient ?

Sammy : Tous les deux quoi, que ce soit ceux qui créaient des fausses nouvelles ou ceux qui les partageaient, ils ne comprenaient pas qu’on remette en question leurs déclarations et c’était pas très facile. Il y a eu même des médias et parfois ils comprenaient pas comment …

« On est tous journalistes, mais notre publication, vous la fact-checkez ? » Ca nous a créé un peu de soucis avec beaucoup de gens. Après ça, on est on est devenu comme une référence et quand il y a une publication douteuse ils reviennent et nous taguent parfois dans les commentaires ou nous envoie la publication par mail ou sur Messenger.

Sammy Mupfuni, sur l’accueil de CongoCheck par ses confrères journalistes

Ca commence à se comprendre, un peu ils commencent à comprendre.

Nelly : Vous parliez de votre partenariat aussi avec Facebook et je suis curieuse de savoir comment ça se déroule exactement un partenariat avec Facebook quand on est fact-checker

Est-ce que ça change de façon de travailler ?

Sammy : Un tout petit peu parce que avant on travaillait sur des sujets qu’on jugeait très très très très pertinents … Mais avec le partenariat avec Facebook parfois, il suffit qu’il y a une publication même si c’est pas jugé très très pertinent comme on faisait avant, on est obligé, on se sent obligés dans le cadre du partenariat de travailler desus  quoi.

Nelly : et vous avez un certain nombre de publications à vérifier dans le cadre de votre partenariat dans un temps donné?

Sammy : Oui oui mais c’est pas une obligation. On a seulement une barre qu’on peut pas dépasser mais on n’est pas obligé de produire un certain nombre d’articles. Mais quand même quand il y a beaucoup de publications vérifiées, ça montre qu’on est appliqués quoi.

Guillaume : Quand vous dites qu’il y a une barre que vous ne pouvez pas dépasser, c’est qu’il y a un certain nombre de publications limite ou c’est une barre minimum sous laquelle vous ne devez pas passer ?

Sammy : c’est une barre maximum qu’on peut pas dépasser parce qu’on est sur trois pays et il y a un nombre fixé, un plafond.

Guillaume : D’accord. Pour revenir sur ce que vous disiez que vous estimiez la pertinence des vérifications prioritaires à traiter et puis dans le cadre du partenariat, vous disiez « Il y en a d’autres aussi que nous on estimait pas forcément prioritaires » mais c’est parce que elles sont très massivement partagé sur Facebook et que leur drapeau se sont levé chez Facebook?

Sammy : c’est parce que c’est très partagé sur Facebook et dans l’esprit de Facebook c’est de limiter la visibilité de toutes les fausses nouvelles sur leur plat-forme. Dans le cadre de ces partenariats on traite de ce genre de publication même si pour nous ça n’a pas beaucoup d’impact, mais si ça a un impact sur un réseau social qui est un partenaire on le fait quand même.

Guillaume : Ce qui est intéressant par rapport à d’autres fact-checkers qui ont pas accès à ce genre de partenariat, c’est que vous pouvez savoir aussi ce qui se partage beaucoup sur Facebook sans avoir à surveiller ?

Sammy : Bien sûr. Si je l’ai pas souligné, on fait quand même la veille sur les réseaux sociaux. Toute l’équipe cette trentaine de journalistes fait la veille sur les réseaux sociaux. On reçoit aussi de des signalement des internautes qui nous soumettent des publications à vérifier mais ça arrive pas très souvent.

Mais comme on a l’accès sur l’outil de Facebook qui lui-même regroupe toutes publications qu’il faut vérifier, parce que quand y a signalement des internautes des utilisateurs de Facebook qui signale une publication, automatiquement la publication rentre dans l’outil auquel on a accès et ça nous aide beaucoup d’avoir accès à ce genre de contenu à vérifier ça nous aide énormément

Nelly : On parle de réseaux sociaux et c’est effectivement très intéressant mais je voudrais revenir sur ce que vous disiez au début de ce podcast, c’est-à-dire que vous faites énormément de choses. Vous faites de la vérification de faits sur Internet, vous faites de la vérification de faits sur les réseaux sociaux, vous avez une académie de fact-checker que vous formez … Je voyais à l’instant que le taux de pénétration d’Internet en République Démocratique du Congo est de 19%. Vous disiez tout à l’heure que vous faisiez également des activités où vous descendez sur le terrain pour aller informer les populations : j’aimerais en savoir plus. Quelles sont ces activités que vous faites et à quel public vous vous adressez ?

Sammy : Lors des activités hors ligne ça sert à souvent, c’est beaucoup plus dans le cadre de notre centre. C’est un centre d’éducation aux médias dont je voulais préciser qu’il n’est pas seulement adressé aux fact-checkers, aux journalistes. C’est aussi un cadre qui nous permet de vulgariser les techniques de vérification pour tous les membres de la communauté 

Guillaume : donc ça c’est à Goma ?

Sammy : Ouais c’est à Goma. On le fait également dans d’autres villes de la région du Kivu, on l’a aussi fait une fois fait à Kinshasa ici dans la capitale. Quand on ne le pas en ligne c’est souvent beaucoup plus dans ce genre d’activité de partage de connaissances sur la vérification qu’on en profite pour débattre de certains sujets 

Guillaume : et qui vient ce genre d’événement ?

Sammy : on a des étudiants, des influenceurs, des personnes très influentes sur les réseaux sociaux, des gestionnaire de groupe WhatsApp …On sélectionne des catégories. Je crois qu’on va étendre l’activité aux enseignants d’école primaire, d’universités, ainsi qu’à toutes les catégories, toutes les couches de la population. Jusque là on a déjà fait avec des étudiants, des gestionnaires de groupes WhatsApp (parce que c’est très fréquent que les fausses nouvelles circulent dans le groupe WhatsApp) ainsi que des influenceurs sur les réseaux sociaux, des personnes qui ont beaucoup de followers sur les réseaux sociaux. On va l’étendre à d’autres couches de la population 

Guillaume :  Est-ce que le partenariat avec Facebook inclut aussi les publications sur WhatsApp ou pas du tout ?

Sammy : Jusque là non c’est encore sur Facebook et sur Instagram 

Logo de WhatsApp

Guillaume : et pourtant la plateforme sur laquelle la désinformation se propage le plus n’est pas comprise dans le partenariat 

Sammy : Je crois qu’ils ont pas encore beaucoup de contrôle sur tout ce qui circulent dans des groupe WhatsApp ou sur sur cette messagerie mais en tout cas jusque-là on est encore sur Instagram et Facebook. J’avoue que sur WhatsApp y’a beaucoup de fausses nouvelles qui circulent, c’est l’un des plus grands canaux.

Nelly : Vous me disiez que vous étiez présents en République Démocratique du Congo, au Congo Brazzaville et en République Centrafricaine. Je vois que vous vous exprimez principalement en français … Est-ce que vous exprimer aussi dans d’autres langues ou est-ce que vous dispensez des formations dans d’autres langues que le français ?

Sammy : En tout cas, le français est la langue principale mais il nous arrive de vérifier des publications dans d’autres langues locales. Mais le travail se fait généralement en français.

Nelly : d’accord

Guillaume : Donc on a parlé des partenariats au lancement, avec des partenaires qui sont devenus des partenaires réguliers, on a parlé du partenariat de Facebook … Est-ce que vous avez établi aussi des partenariats avec d’autres initiatives d’éducation aux médias, de lutte contre la désinformation, de fact-checking dans la région ?

Sammy : En Afrique on a un regroupement d’organisations de fact-checking qui s’appelle Africa Facts. On a également une collaboration avec d’autres organisations de fact-checking sur la pandémie de COVID-19. On est membre de l’IFCN, qui est un regroupement d’organisations de fact-checking au niveau international et d’ailleurs qui nous a permis de décrocher le partenariat avec Facebook. On collabore très régulièrement avec d’autres organisations de fact-checking. Dans le cas d’Africa Facts, on vient d’avoir récemment une réunion et on est en train d’en préparer une autre dans quelques semaines pour partager des expériences et parfois prévoir d’éventuelles collaborations sur certains sujets.

Guillaume : parce qu’il y a des désinformations transfrontalières ?

Sammy : Bien sûr qu’il y en a. Quand c’est lié à la à la pandémie de COVID-19, il y en a eu qui concernait à la fois plusieurs pays 

Nelly : C’est, je le répète souvent dans ce podcast, mais c’est important de se serrer les coudes entre les initiatives de lutte contre la désinformation. La question qui s’en suit est celle de savoir comment vous arrivez à garder la motivation de votre équipe, de vos troupes, de 30 journalistes à l’intérieur de CongoCheck ?

Sammy : Comme je l’ai dit au début c’est donc parmi les critères de recrutement, c’est la motivation. On ne prend que des gens qui sont très motivés, très engagés, qui expriment leur motivation à accompagner l’initiative. Je ne l’ai pas souligné au début mais actuellement on a quelques piges pour nos collaborateurs à la fin du mois, mais au début c’était pas sûr, on était tous des volontaires. D’ailleurs, moi qui ai travaillé avec des agences de presse, je soutenais souvent toutes les activités de vérification, les moyens de communication ici c’est encore cher, Internet c’est cher en RDC. Ca demande de l’argent, ainsi que du transport voilà, c’est moi qui soutenait également avec des amis qui me rejoint, je cite Rodriguez Katsuva et Fiston Mahamba, on a soutenu les activités avant de commencer avoir quelque soutien de tes partenaires. 

Donc la motivation c’est ça comptait beaucoup au début pour nos collaborateurs et ça continue à faire qu’on reste ensemble jusque là

Guillaume : pour aller où ? C’est quoi l’avenir du CongoCheck ?

Sammy : Pour moi ce qui est plus durable, c’est le le partage de connaissances donc les centres. Pour moi c’est ça, le projet le plus durable dans CongoCheck, le centre d’éducation aux médias parce que ça nous aide à partager les connaissances en vérification. Ca permet que les membres de la communauté soient eux-mêmes capable de vérifier les formations, les publications qui les font douter. On est une équipe de trente et c’est pas beaucoup pour trois pays dont la RDC qui qui a plus de 80 millions d’habitants actuellement. Le partage de connaissances, le fact-checking, la vérification de faits à travers le centre d’éducation je vois que c’est un projet très important. C’est beaucoup plus durable que vérifier chaque contenu quand il est publié.

Nelly : La vérification des faits mais aussi le partage et la transmission de connaissances pour Congo check merci beaucoup