En Afrique francophone, plusieurs médias et organisations ont mis en place des collaborations sur le long terme, comme la Plateforme africaine des fact checkers francophones (PAFF) et la Coalition Anti Dohi en Côte d’Ivoire. Leurs enquêtes dépassent les frontières, touchent de nouveaux publics et peuvent être lues malgré un contexte politique tendu pour les journalistes. Le journaliste Cédric Barnet Tchapo était invité d’ODIL Le Podcast pour parler de ce sujet.
Les vérificateurs de faits sont de plus en plus nombreux à construire ensemble des coalitions transfrontalières. Généralement, elles se créent à l’aune d’une période électorale ou dans le cadre d’une enquête collaborative. En Europe, seule la Norvège est parvenue à pérenniser un projet d’une telle ampleur avec le site de vérification des faits Faktisk.no. En Afrique, la Plateforme africaine des fact-checkers francophones (PAFF) existe depuis 2024. Depuis sa création, cette alliance d’une dizaine de médias publie « des travaux de recherche approfondis sur les questions de désinformation et de sécurité », explique Cédric Barnet Tchapo, rédacteur en chef adjoint d’Ivoirecheck. Il est également membre de la PAFF et de la Coalition Anti Dohi, un groupe de médias et d’organisations de la société civile créé pour contrer la désinformation en Côte d’Ivoire.
Certains partenaires se connaissaient déjà par ailleurs, sans avoir travaillé ensemble auparavant pour autant. « Nous voulions concilier les efforts pour mieux combattre les désordres de l’information. C’est dans ce but que la PAFF a été créée », rappelle Cédric Barnet Tchapo. Deux enquêtes au long cours ont été publiées par la plateforme depuis, portant sur des sujets transfrontaliers à l’image de la coalition. Selon Cédric Barnet Tchapo, la PAFF adopte « un regard assez large sur des questions que les gens se posent, sur comment le fact checking se fait aujourd’hui (…) et même parfois sur des questions d’angles morts qui échappent aux fact checkers. »
Les alliances transfrontalières sont aussi l’occasion de s’entraider, notamment lorsque la liberté de la presse est menacée dans le pays d’un journaliste membre. « C’est une façon d’être un peu libres ailleurs, explique Cédric Barnet Tchapo. Mais le plus important, c’est que la politique n’arrêtera pas les enquêtes de la PAFF parce que les journalistes sont muselés dans certains pays d’Afrique francophone ou autres ». Selon lui, la PAFF permet « de dépasser toutes ces façons de museler les journalistes et d’être lus ».
En plus d’être un espace d’entraide pour les journalistes, les coalitions leur permettent de toucher un plus large public. C’est le cas de la Coalition Anti Dohi, qui a pu bénéficier de l’audience des journalistes d’actualités, des professionnels de l’éducation aux médias et des radios partenaires. « La Coalition Anti Dohi a eu du succès. (…) On en parle partout en Côte d’Ivoire, même à la télévision publique. Certains de nos confrères sont invités pour parler de la coalition », se félicite Cédric Barnet Tchapo, qui précise que la coalition ne va pas s’arrêter à la couverture de l’élection présidentielle qui a eu lieu le 25 octobre dernier dans le pays. « C’était aussi le lieu pour apprendre beaucoup les uns des autres », témoigne-t-il. Ivoirecheck a en effet tiré des enseignements de ces coalitions, sur les techniques d’écriture ou encore sur la gestion des contenus sur les réseaux sociaux. Une manière d’ancrer la solidarité entre vérificateurs dans le temps.
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